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Air Austral : un week-end sous tension

Nouvelle journée vaine de discussions, hier, chez Air Austral pour tenter d'aboutir à un accord de performance collective. Pour sortir des fortes turbulences, la direction veut convaincre les syndicats de réduire les rémunérations. Les représentants du personnel disent "niet". Ils proposent d'autres solutions. Les négociations pourraient reprendre ce week-end.


Auteur de l'article : Air Austral : un week-end sous tension
Rédigé par Clicanoo

Depuis un mois, direction et syndicats d'Air Austral ferraillent sur des solutions pour diminuer la masse salariale de 12,75 millions sur deux ans. Avec, pour objectif, un accord de performance collective (APC), partie substantielle du futur plan de retournement que la compagnie doit présenter à l'État mi-mai afin de prouver sa viabilité et une visibilité sur trois ans. Dans l'équation, l'actionnaire privé, Run Air, et l'actionnaire public, la Sematra (détenu majoritairement par la Région), conditionnent un nouvel apport en compte courant de 10 millions à la signature de cet accord.


L'encre des stylos sera-t-elle bientôt couchée sur un protocole réunissant toutes les parties ? Non, si l'on en croit les syndicats. Après une journée de jeudi qui n'a débouché sur aucune avancée, celle d'hier donne l'impression de reculer. La raison : l'État, qui a aidé pour plus de 110 millions Air Austral, qui a négocié avec l'Union européenne et qui est prêt à se montrer patient sur de nouvelles dettes fiscales sociales et de versements de taxes, a demandé la signature d'un accord le 30 avril. Avant de repousser cette date à hier soir. Résultat : un échec.


Le délai voulu par le gouvernement n'est pas respecté. "Nous ne sommes pas parvenus à un accord", a informé, hier, en fin d'après-midi, Baptiste Deï-Tos, du syndicat SNPNC-FO. "Nous avons quitté la table des négociations avec un désaccord complet", dit, de son côté, Frédéric Bénard, délégué syndical pour la CDFT.

"C'EST IRRECEVABLE POUR NOUS"

Pour les représentants du personnel, la ligne blanche à ne pas franchir reste la baisse des rémunérations.

"Notre position est très claire : aucune baisse des salaires, ajoute Frédéric Bénard. Mais les discussions portent là-dessus. Nous préférons des leviers structurels, organisationnels et opérationnels. Au pire s'il fallait toucher aux rémunérations, ce serait sous la forme de prêts et pas de dons. Mais cela a été une fin de non-recevoir de la direction."

"Nos propositions sur la productivité ont été retenues et ce sont des mesures pérennes, souligne également Baptiste Deï-Tos. Mais la direction n'a pas retiré les éléments sur la rémunération qui a impacté sur les salaires. C'est irrecevable pour nous."


Selon nos informations, la direction maintient sa volonté de demander à chacun d'accepter une baisse de salaire en fonction du niveau de rémunération. Les membres du directoire désignés pour ces négociations cherchent à convaincre le syndicat sur une "clause de retour à meilleure fortune." Autrement dit, se serrer la ceinture aujourd'hui et profiter des jours meilleurs quand ils seront là. Le directoire a ainsi imaginé un accord proposant, le 31 mars 2025, une révision de l’accord sur la baisse des salaires à condition que le résultat d'exploitation soit supérieur à 6,3 % du chiffre d'affaires. Il sera également prévu un accord sur de l'intéressement ou de l'actionnariat salarial en y consacrant 25 % du résultat net. A contrario, dans une version pessimiste de prolonger l'accord sur un ou deux ans si la profitabilité n'est pas revenue à un niveau suffisant.


Les syndicats restent hostiles à toute mesure touchant aux rémunérations. Frédéric Bénard n'hésite pas à parler "d'échec."

"Nous avons tenté de trouver des solutions, insiste-t-il. Aux actionnaires de prendre leurs responsabilités. Le directoire devrait avoir une réflexion plus ouverte sur les sujets et comprendre les difficultés des salariés. Nous subissons l'inflation comme tous les salariés. Pouvoir entendre que nous devons accepter une baisse de rémunération comme levier, c'est non. Ce n'est pas envisageable." "Pourtant, nous mettons beaucoup de choses sur la table qui va dans le sens de l'entreprise et des actionnaires", assure Baptiste Deï-Tos.

"LE FOSSÉ EST ÉNORME"

Le dialogue est-t-il rompu ?

"Le fossé est énorme. Mais, quand on a envie, il y a toujours la possibilité de mettre des gens autour de la table pour avancer, répond Frédéric Bénard. Je ne pense pas que la direction va se fermer à un APC."

Même si, hier, en fin d'après-midi, les leaders syndicaux disaient "ne pas avoir de calendrier", les négociations ont des chances de reprendre aujourd'hui. "Nous ne pouvons nous permettre d'arrêter toute négociation. Cela voudrait dire la fin d'Air Austral. C'est le souhait de personne", convient Baptiste Deï-Tos.


Pour la direction d'Air Austral, les négociations ne sont pas "rompues mais se poursuivent." Selon la directrice de la communication, Emmanuelle Naourès, "la direction a fait des avancées." "Les discussions vont reprendre. C'est une question d'heure. La priorité pour tous, c'est la pérennité de l'entreprise et son avenir."


Membres de la direction d'Air Austral et responsables syndicaux pourraient donc se retrouver dans un week-end sous-tension. Et si besoin en début de semaine. Les syndicats ont toutefois bien fait comprendre, hier, qu'ils campaient sur leurs positions et leur refus de toucher aux salaires.


JÉRÔME TALPIN
 


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